Vu de l'extérieur, la Thaïlande a l'image d'un pays gangrené par tous les vices et le paradis touristique avec les plages et les paysages idylliques. De l'intérieur, c'est un pays complexe où se côtoient le modernisme et une profonde spiritualité. Ceux qui connaissent ce pays sont impressionnés par la place que prend la spiritualité dans la vie de tous les citoyens thaïs. À côté des buildings étincelants, la multitude des temples que compte le pays ne cesse d'étonner. Le bouddhisme est omniprésent dans la vie des thaïs. Ça se voit par tous les moines en robe safran qui font l'aumône tous les matins et les phra pum, ces petits temples qui sont censés abriter les esprits bienveillants, que l'on retrouve devant chaque maison. Dans le nord de la Thaïlande, un bâtiment singulier se distingue. Il s'agit du Wat Rong Khun, un temple moderne qui est toujours en construction. Connue comme le temple blanc, cette structure est née de l'imagination d'un artiste un peu excentrique à la suite de sa prise de conscience des pratiques spirituelles de son héritage bouddhiste. Même si la fin de sa construction n'est pas prévue avant 2070, le Wat Rong Khun est devenu un lieu emblématique de la ville de Chiang Rai et des milliers de visiteurs locaux et étrangers s'y pressent chaque année.
C'est en 1996 que démarre le chantier du temple blanc en Thaïlande. L'artiste peintre Chalermchai Kositpipat, à qui l'on doit une partie des peintures murales du Wat Buddhapadipa, le premier temple bouddhiste de Londres, a conçu et finance le temple blanc à hauteur de 40 millions de bahts, soit 4 millions €. Afin d'éviter une influence extérieure, les dons sont limités à 10 000 bahts (environ 250 €). Le financement est assuré par les billets d'entrée des visiteurs étrangers et la vente des peintures de l'artiste. L'entrée est gratuite pour les thaïlandais. Aujourd'hui, le temple de Chiang Rai est d'une importance capitale pour le tourisme en Thaïlande.
Le Wat Rong Khun est le temple de Thaïlande qui se démarque le plus des autres temples que l'on peut voir dans tout le pays. Ce qui le distingue au premier regard est la couleur du bâtiment. Il est d'une blancheur éclatante, à l'opposé des autres structures où le rouge et l'or dominent. Il s'illumine d'autant plus que des centaines de morceaux de miroirs reflètent la lumière du soleil sur toute sa surface.
Le Wat Rong Khun est un temple bouddhiste tombé en ruines dans la province de Chiang Rai, dans l'extrême-nord de la Thaïlande. C'est la municipalité de Chiang Rai qui décida de le rénover, mais dut abandonner le projet pour raisons financières. Arrive alors Chalermchai Kositpipat, un artiste peintre thaïlandais reconnu, qui décide de réaliser une œuvre d'art en l'honneur du roi Bhumibol (Rama IX), le monarque le plus vénéré de la Thaïlande. L'artiste, originaire de Chiang Rai, décide de construire un temple d'un nouveau genre, mêlant le bouddhisme classique à l'art moderne. Sur les ruines d'un ancien temple, va s'ériger, à Pa O Don Chai, à 10 km de la ville, un complexe unique qui reflète tous les attributs du bouddhisme.
Conçu, à l'origine, comme une œuvre d'art, le complexe n'échappe pas aux attributs du bouddhisme. Car malgré son aspect artistique, c'est avant tout un édifice religieux où tout rappelle les enseignements du Bouddha. La construction du temple a été marquée par les différents événements qui ont émaillé l'histoire récente de la Thaïlande. Des crises politiques et économiques au tremblement de terre de 2014, qui a failli provoquer l'annulation du projet, on peut dire que la construction a été mouvementée.
Le Wat Rong Khun emmène le visiteur dans un univers féerique où les valeurs du bouddhisme côtoient les symboles du monde moderne. Ce lieu est déconcertant. Le calme et le sacré sont souvent interrompus par les évocations du matérialisme. Ainsi, à côté des statues qui ornent les temples d'habitude, on retrouve des images qui évoquent le monde moderne. Les événements du 11 septembre, les figures de George Bush et de Bin Laden rappellent ce que l'humain est capable de faire. Les héros de la culture populaire sont bien loin du spirituel, mais la représentation de Po, le héros de Kung Fu Panda ou de Batman sont autant de clins d'œil à la Pop Culture qui rappellent aussi que ce temple est une œuvre d'art. Toute la symbolique bouddhiste est présente dans l'architecture du temple blanc.
Dans son livre : White temple - Wat Rong Khun, Chiang Rai, Thailand, Chalermchai Kositpipat parle de sa vision artistique, mais aussi de son rêve de réaliser une œuvre qui représente les enseignements spirituels du Bouddha à travers les références contemporaines afin d'amener une réflexion sur les défis mondiaux.
Le temple blanc est un monument à la gloire du bouddhisme et du roi Rama IX. À travers des peintures et des sculptures, l'artiste a réussi un oxymore entre le sacré et le profane. Les éléments traditionnels qu'on retrouve dans les temples thaïlandais côtoient des peintures et des sculptures contemporaines représentant le monde moderne et ses contradictions.
Il y a bien des sculptures et des peintures religieuses en référence à la spiritualité et aux valeurs bouddhistes au temple Wat Rong Khun, Thailand, mais ça ne s'arrête pas là. Le temple blanc est le plus étonnant temple en Thaïlande. C'est une narration visuelle unique de la spiritualité, mélangeant des motifs récurrents de la vision bouddhiste et des commentaires sociaux sur la cupidité, la tentation et le désir dans le monde d'aujourd'hui. Une visite dans ce lieu unique est une expérience inoubliable pour se plonger dans un univers fantasmagorique et découvrir la spiritualité sous une autre forme.